L'Echangeoir d'Ecriture

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Appel à textes : troisième sélection, “Logorrhée !”, par Gilles Massardier

Appel à textes: nouvelle n°2, Le bon sens.

Nouvelle découverte aujourd’hui avec notre troisième sélection dans l’appel à textes  « expérimentation libre avec la nouvelle ». Voici Logorrhée !, par Gilles Massardier.

troisième nouvelle appel à textes

Mais avant de pouvoir découvrir le texte, voici les contraintes que s’est imposé l’auteur avant de laisser parler son imagination.

Les contraintes:

  • Genre : Fantastique.
  • Forme : Expérimentale.
  • Disparition progressive de mots, sans nuire à la compréhension du texte.
  • Aucune répétition (sauf :je, tu, il, nous, vous, ils, elle, elles, et, ou ) sans tricher avec la disparition de mot.
  • Une histoire sans explication sur les raisons de ce qui arrive, sans contexte.
  • Une chute neutre.

Bonne lecture !

Logorrhée !

15 Septembre

Ce que j’écris est un témoignage pour la postérité, pour moi.

Je ne sais pas qui lira ce travail, ni même si quelqu’un le trouvera. Certains actes de l’Homme sont gratuits. C’est bien ce qui fait de nous des Êtres spécifiques.

Rédiger ce journal est une gageure, les … commencent à manquer. Il risque d’être peu cohérent.

Je viens de m’apercevoir qu’un …  est absent de la phrase précédente. Je suis déstabilisé, le concept est vivace dans mon esprit. Je sais ce que je veux dire. Je ne peux pas l’exprimer.

Cela a commencé il y a deux jours. J’ai bien cru devenir fou. Une impression désagréable, ma mémoire flanche-t-elle ? Nombre de …  m’échappent, impossible de les prononcer. Je suis allé voir mon …, le ?  soignant ! Pour lui expliquer ma curieuse défaillance. Il ne tique pas. Le ?  Soi… souffre de ce trouble mémoriel. Nombreux sont les patients qui sont venus le questionner. Tous nous oublions les mêmes …, l’amnésie s’aggrave quotidiennement.

Nous avons été informés qu’une épidémie se répandait dans le monde. Un …  qui se serait répandu contaminant la planète. Les plus grands linguistes, les docteurs en physique quantique, les meilleurs professeurs, médecins, biologistes, neurologues et autres chimistes se sont rassemblés. Les théologiens ont avancé des hypothèses. Les philosophes ont réfléchi sur le sens de l’épineuse question qui se pose. Ils ont tous conclu que le vocabulaire se délitait, que les … manquaient pour poser un diagnostic, qu’aucune langue n’est épargnée !

 

16 septembre

Le désespoir menace l’… entière (la globalité des êtres vivants et pensants de notre Sphère).

Les …  prennent vie. Ceux-là même que nous perdons, revêtent une apparence. Les premiers … ont commencés à se « matérialiser », ce sont des …  concrets. Facilement reconnaissable par la nature très proche physiquement de leur signifiant. Différents malgré tout, par un je ne sais quoi d’immatériel. Ils sont tout à la fois palpables et impalpables. Ils sont des ombres projetées sur un écran mouvant.

Ils deviennent agressifs. Ils s’attaquent aux  … La victime se fond dans le … . La Chair est engloutie par la Parole. Un Logos dément, glouton et insatiable.

 

17 septembre

La réaction gouvernementale, prompte, irrationnelle est pire que le … ! L’armée a été mobilisée ! Les …  sont de plus en plus violents. Aux …  on nous rassure, l’assaillant est fragile, volatil. N’importe quelle arme peut les faire passer de vie à … . L’horreur de la situation semble échapper à tous. La force brutale prend le dessus sur la verbalisation. Les coups remplacent les … . Le fait de détruire le … a pour seul résultat la disparition totale du concept/réalité que les … représentent.

 

18 septembre

L’ …  militaire est un drame. Une multitude d’être vivants, d’idées, disparaissent purement et … .

La chasse aux … après avoir été ouverte vient de se voir proscrite.

Des …  rôdent aux alentours de ma … . Je dois me méfier. Je crois bien que pour les … l’écriture est un crime, un esclavage auquel ils seraient soumis, la perte de leur libre arbitre !

Je reprendrai mon ouvrage plus tard, l’hypothèse me terrifie.

 

21 septembre

Deux ….  que je n’ai rien couché sur le papier. Je suis étonné par l’apparente cohérence de mon récit.

Les …  ne s’effacent pas, bien qu’ils aient disparu depuis quelques …  déjà. C’est curieux, ce qui est noté n’est pas atteint. Comme si l’écriture les figeait dans la mort. Je suis triste.

J’expliquais qu’au début, les …  qui se sont émancipés, déterminaient des choses concrètes.

Leurs formes étaient semblables à ce qu’ils désignaient. Les …  abstraits eux se présentaient sous des formes particulières. Imaginez une équation qui prendrait … . Qui par son aspect vous ferait comprendre, une sorte de viol de la pensée, sa signification. Il y a de quoi perdre la raison. Ce qui nous aurait été utile pour l’appréhender nous échappe.

Dans cette folle émancipation des … je perçois une certaine …  . Aucun verbe n’a pris, pour l’instant, sa liberté. Peut-être est-ce trop compliqué pour eux, chaque …  , les …  modes cherchant à prévaloir sur l’autre. Ça ne facilite pas l’évasion. Les articles, les pronoms personnels semblent eux aussi encore prisonniers de nos …  .

Mais ces … scellées par l’absence des … , ne retiennent plus rien. La vérité s’enfuit de l’intérieur de nous. Le … qui désignait un silence volontaire sur une information détenue par deux ou plusieurs …, a pris sa … . Plus rien ne peut rester en nous.

 

22 …

Je … c’est difficile de garder les …  je dois me reposer un peu.

 

23 …

L’on a mal. Violence d’écrire. Peu de …  à  disposition. L’ … est advenue hier. On ne pense plus à …  Un … fondamentalement à nous, manque! Comment parler de on, de ce on unique, un «  On » qui désigne celui qui fait face à on dans une  … .

L’on n’existe plus réellement. La parole… . Les … sont les maîtres. Ils se rassemblent en longues colonnes. Ils détiennent la … . On ne sait plus. On écrit pour être. On se bat.

On est surpris par la vitesse de … . Avant, il y a peu de durée, on avait les … pour le dire. La peur ronge on. I1s grouillent autour de on. On, résiste, on se bat. Fatigue de on. Un seul …  pour tout conclure. Abréger les douleurs de on. Violence!

 

24…

On, dernier. Peur, finir. Ils partout. Douleur…

On, larmes. Muet. On, sans … . Cousue.

On, gémir, un  … ?

 

25…

 

N’hésitez pas une fois encore à donner votre avis, en commentaire. Les réponses constructives sont toujours intéressantes !

2 réflexions sur “Appel à textes : troisième sélection, “Logorrhée !”, par Gilles Massardier”

  1. un concept intéressant, j’avoue que j’ai eu du mal à aller jusqu’au bout. En tout cas c’est un sacré travail de réussir à faire passer la tension tout en déstructurant la pensée.
    merci pour ce texte

  2. Christine Guyot

    J’ai beaucoup aimé le thème de cette nouvelle. Je trouve que ça laisse au lecteur suffisamment de place pour laisser vivre son imagination. La tension qui se développe au fur et à mesure du déroulement de l’histoire est très efficace. Pour moi c’est une nouvelle qui m’a permis de ressentir. Bravo ????

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